FUMEES DE DIESEL
Les informations fournies par cette fiche sont indicatives, sans valeur légale et sans caractère obligatoire.
Définition de la nuisance ou situation dangereuse
Les gaz d’échappement des moteurs diesel sont produits par la combustion du carburant diesel. Mélange d’hydrocarbures pétroliers, sa composition varie selon l’origine des bruts dont il dérive et la nature des procédés de raffinage qu’il a subi. Les émissions des moteurs diesel sont un mélange complexe de substances gazeuses et particulaires, dont la composition dépend de nombreux facteurs : carburant, additifs, lubrifiants, caractéristiques et entretien du moteur, régime…
Les principaux polluants gazeux sont les oxydes de carbone (CO et CO2, pour le CO en moindre quantité que dans les moteurs à essence ou à gaz), les oxydes d’azote (NO, NO2), des hydrocarbures imbrûlés, aliphatiques ou aromatiques (benzène), des aldéhydes (formaldéhyde…), des oxydes de soufre. La phase particulaire est constituée de particules fines et ultrafines (PUF), de diamètre aérodynamique < 100 nm, formées de carbone élémentaire sur lequel s’adsorbent des HAP, des nitroarènes et des composés minéraux (nitrates, sulfates…). Les HAP et les nitroarènes se partagent les phases gazeuse et particulaire.
Danger
La directive européenne 2019/130 du 16 janvier 2019 a inscrit « les travaux exposant aux émissions d’échappement de moteurs diesel » à la liste des substances, mélanges et procédés de l’annexe 1 de la directive 2004/37/CE définissant les agents cancérogènes.
L’arrêté du 3 mai 2021 a modifié l’arrêté du 26 octobre 2020, en complétant la liste des substances, mélanges et procédés cancérogènes au sens du code du travail, avec les « travaux entraînant une exposition cutanée à des huiles minérales qui ont été auparavant utilisées dans des moteurs à combustion interne pour lubrifier et refroidir les pièces mobiles du moteur et « les travaux exposant aux émissions d’échappement de moteurs Diesel.»
Ces dispositions entrent en vigueur le 1er juillet 2021.
Les gaz d’échappement de moteurs diesel sont classés cancérogènes avérés pour l’homme groupe 1 par le CIRC (Le Centre international de recherche sur le cancer) depuis juin 2012.
L’exposition se fait exclusivement par voie respiratoire.
Effets aigus
- perception d’une odeur désagréable ;
- irritation oculaire, des voies aériennes supérieures, et à un moindre degré respiratoire ; syndrome d’irritation bronchique aiguë possible après exposition massive aux émissions (oxydes d’azote et de soufre, aldéhydes) en milieu confiné ;
- exacerbation d’un asthme préexistant ;
- intoxication aiguë par le monoxyde de carbone possible lors de travail en milieu confiné ; effet ischémique myocardique possible chez le coronarien.
Effets chroniques
- augmentation des symptômes de toux et d’expectoration chronique par altération des mécanismes de clairance pulmonaire ;
- atteinte de la fonction respiratoire et développement d’une BPCO non démontrés ;
- chez l’asthmatique, potentialisation de la réponse allergique et effets pro-inflammatoires participant au développement de la maladie ;
- cancer du poumon : les études épidémiologiques montrent un excès de risque modéré (SMR, OR ou RR < 1,5) chez des sujets exposés dans différents secteurs industriels, le plus souvent avec une relation dose-réponse (exposition cumulée). Le CIRC considère qu’il existe des preuves suffisantes de risque de cancer bronchopulmonaire associé aux émissions des moteurs diesel ;
- cancer de la vessie : les études de cohortes sont négatives ; le CIRC considère comme limité le niveau de preuve d’un effet cancérogène pour la vessie des émissions diesel.
A noter que la composition des émissions diesel a évolué au cours du temps, en raison des modifications de la technologie des moteurs diesel et de la composition des carburants. Ainsi, depuis 2006, la masse de particules émises aurait diminué de 90 % par rapport à la période antérieure à 1988. Le risque de cancer pulmonaire a été évalué sur la base de l’ancienne technologie d’émissions et, pour certains experts, mériterait d’être réévalué en fonction des progrès accomplis pour diminuer la pollution des moteurs actuels (concerne surtout les véhicules routiers).
Tâches et postes
Activités et situations de travail | Postes de travail |
---|---|
Travail en milieu confiné : tunnel, dépôt, souterrain, sous-sol… | Tunnelier, magasinier, … |
Travail à proximité des engins | Ouvrier routier |
Entretien et dépannage des camions et engins | Mécanicien TP |
Conduite d’engins, de camions … | Conducteur d’engins, chauffeur PL… |
Travail à proximité d’un compresseur, générateur en milieu confiné | Métiers du BTP |
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Niveau d'exposition
Temps : durée - fréquence
Exposition | Permanente | Fréquente | Intermittente | occasionnelle |
---|---|---|---|---|
% | > 70 | > 30 | > 5 | < 5 |
Jour | > 6 heures | > 2 heures | > 30 mn | < 30 mn |
Semaine | > 3 jours | > 1 jour | > 2 heures | < 2 heures |
Mois | > 15 jours | > 6 jours | > 1 jour | < 1 jour |
Années | > 5 mois | > 2 mois | > 15 jours | < 15 jours |
Intensité
Pour la phase gazeuse : VLEP et VLCT pour certains gaz constituants les fumées :
carbone (CO), monoxyde d’azote (NO), dioxyde d’azote (NO2), dioxyde de carbone (CO2)
VLEP CO : 20 ppm ; 23 mg/m3 VLCT :100ppm ; 117mg/m3 valeurs contraignantes
VLEP NO : 2 ppm ; 2,5 mg/m3 valeurs contraignantes
VLEP NO2 : 0,5 ppm ; 0,96 mg/m3 VLCT : 1 ppm ; 1,91 mg/m3 valeurs contraignantes
VLEP CO2 : 5000 ppm ; 9000 mg/m3 valeurs indicatives
Pour la phase particulaire :
La mesure du carbone élémentaire, choisi comme traceur, permet une évaluation quantitative de l’exposition aux particules diesel.
VLEP réglementaire mesurée sous forme de carbone élémentaire =0,05mg/m3 (applicable au 21 février 2023 ; sauf pour les secteurs de l’extraction souterraine et du creusement de tunnels où la VLEP s’appliquera au 21 février 2026)
Deux TRK (valeurs guides allemandes) appliquées en Autriche et en Suisse exprimées en carbone élémentaire : (METROPOL)
- Mines souterraines et travaux souterrains : 0,3mg/m3 ou 300µg/m3
- Travaux à l’air libre : 0,1 mg/m3 ou 100 µg/m3
Ces valeurs s’appliquent à la fraction alvéolaire de l’aérosol.
Conditions d'exposition
Matériaux
La composition du carburant diesel varie selon les matières premières de pétrole brut, les processus de fabrication, de mélange, les additifs et lubrifiants.
La concentration des différents constituants émis dépend de nombreux facteurs, notamment, le type de moteur, la qualité de l’entretien du moteur, le type de carburant utilisé, le régime du moteur et la présence d’un dispositif de dépollution.
Matériels
Moteur diesel (engins, PL, VL), compresseur, générateur
Cofacteurs environnementaux
Milieu confiné, travaux souterrains en galerie, tunnel…
Conditions météorologiques.
Facteurs individuels
Pathologies broncho-pulmonaires. Pathologies cardiaques. Tabac
Barème de décision
Critères complets
Le score obtenu par addition des différents coefficients de pondération sert de guide pour la mise en place de la stratégie de surveillance médico-professionnelle.
Conditions d’exposition | Permanente | Fréquente | Intermittente | Occasionnelle |
---|---|---|---|---|
Engins : | ||||
PL | 3 | 3 | 2 | 1 |
Compresseur, Générateur | 3 | 3 | 2 | 1 |
Cofacteurs individuels | ||||
Pathologie respiratoire | 1 | 1 | 0 | 0 |
Pathologie cardiaque | 1 | 1 | 0 | 0 |
Tabac | 1 | 1 | 0 | 0 |
Cofacteurs environnementaux | ||||
Milieu confiné | 3 | 3 | 2 | 1 |
Critères simples
Milieu confiné. Véhicule mal entretenu. Absence de filtre à particule.
Contenu des actions
Suivi réglementaire
Suivi individuel de l’état de santé des travailleurs
Suivi individuel renforcé : concerné
Décret 2001-97 du 1er février 2001 : CMR concerné Décret 2016-1908 du 27 décembre 2016, Art R. 4624-23 du CT : concerné. Les travaux exposant aux émissions d’échappement de moteurs diesel sont classés cancérogènes (Arrêté du 23 mai 2021)
Travaux interdits
Travaux interdits aux moins de 18 ans : Décret 2013-915 du 11 octobre 2013 : concerné (ACD). Dérogation possible selon la procédure de dérogation définie par le décret 2015-443 du 17 avril 2015
Travaux interdits aux salariés en CDD (contrat à durée déterminée) et aux salariés temporaires (D4154-1 du CT) : non concerné
Surveillance post professionnelle
Arrêté du 6 décembre 2011 modifiant l’arrêté du 28 février 1995 : non concerné
Modalités du suivi individuel de l'état de santé
Proposition de suivi individuel de l’état de santé :
Examen médical d’embauche
- Réalisé par le médecin du travail
- Examen médical préalable à l’affectation (R4624-24 du CT ou R4412-44 CT)
- Accorder une attention particulière aux personnes atteintes de pathologies respiratoires ou cardiaques
- Examens complémentaires : EFR systématique
- Information sur le risque, sur les moyens de prévention et sur le suivi médical
- Information sur le tabagisme, aide au sevrage tabagique
Examens périodiques
- Réalisés par le médecin du travail
- Périodicité : ne peut être supérieure à 4 ans. Périodicité de 1 an pour les jeunes de moins de 18 ans affectés à des travaux soumis à dérogation (R. 4153-40 du CT)
- Points de surveillance : rechercher des signes d’irritation oculaires, ORL et respiratoires. Rechercher des pathologies respiratoire (asthme, BPCO) et cardiaque (Angor)
Examens complémentaires :
-
- EFR à renouveler en tenant compte des données de l’interrogatoire et de l’examen clinique éventuel.
- Bandelette urinaire à la recherche d’hématurie.
- En l’absence de recommandations, un suivi RP et /ou TDM thoracique n’est pas préconisé à titre systématique.
- Information sur le risque, sur le tabagisme, aide au sevrage tabagique
Visites intermédiaires
- Réalisées par un professionnel de santé (infirmier en santé travail, collaborateur médecin, interne en médecine du travail, médecin du travail). Au plus tard 2 ans après la visite avec le médecin du travail. Orientation si besoin vers le médecin du travail selon l’âge, l’état de santé, les conditions de travail et les différents risques professionnels selon les protocoles établis.
Traçabilité des expositions:
Renseigner le dossier médical individuel
Depuis la loi 2015-994 du 17 août 2015, l’employeur n’a plus à établir de fiche individuelle de prévention des expositions mais doit déclarer de façon dématérialisée à la caisse d’assurance retraite les expositions des salariés aux facteurs de pénibilité au-delà de certains seuils fixés par décret, seuils appréciés après application des mesures de protection collective et individuelle
Prévention
Prévention collective
Utiliser des moteurs électriques quand c’est possible
Modifier la disposition de l’aire de travail afin de séparer les zones où les employés travaillent des zones où le gaz d’échappement est produit, par exemple : isoler le générateur dans un endroit séparé et aéré
Privilégier l’utilisation d’engins, de véhicules ou de matériels récents, dont le moteur est de plus faible taux d’émission.
Utiliser des systèmes de traitement des gaz d’échappement, comme des filtres à particule ou des convertisseurs catalytiques, y compris pour les matériels récents. Les entretenir.
Effectuer la maintenance des moteurs afin de contribuer à leur efficacité, s’assurer de l’absence de fuite de gaz d’échappement dans la cabine.
Contrôler régulièrement les rejets à l’échappement des engins.
Ventiler les zones de travail, notamment au moyen de la ventilation à pression positive (tunnel), d’appareils d’extraction des gaz d’échappement (aspiration à la source dans les ateliers), de la ventilation générale.
Eloigner les salariés travaillant à proximité des engins et PL
Travailler cabines et fenêtres fermées
Prévention individuelle
En espace confiné : appareil de protection respiratoire à ventilation assistée (TM3P ou TH3P)
Réparation
➡ TRG n° 64 : intoxication professionnelle par l’oxyde de carbone
Remarques
Décret 2003-12-54 du 23 décembre 2003 relatif à la prévention du risque chimique et modifiant le code du travail : concerné.
Arrêté du 3 mai 2021 fixant la liste des substances, mélanges et procédés cancérogènes au sens du code du travail, entré en vigueur au 1er juillet 2021
Pour en savoir plus
➡ Prévention des expositions liées aux émissions des moteurs thermiques. ED 6246 de l’INRS-avril 2016
➡ Prévenir les risques liés aux gaz d’échappement. Dossier INRS septembre 2017